Quand autonomisation des femmes en milieu rural rime avec gestion des déchets
3 AVRIL 2019 - KANTI, HARYANA
À Kanti, dans l’État de l’Haryana, des villageoises, AMMACHI Labs et l’UNESCO recherchent des solutions à la gestion durable des déchets dans une perspective d’autonomisation des femmes.
Afin de mettre en place de nouvelles habitudes de propreté aussi bien dans l’espace public que dans l’espace privé, la première étape a consisté à demander aux membres de la communauté ce qui fonctionnait le mieux pour eux. Après cela, venait l’épreuve de la réalité quand il s’est agi de mettre ces idées en pratique et de garder ces bonnes habitudes sur le long terme.
À Kanti, le moins que l’on puisse dire, c’est que l’équipe était bien fournie pour ce projet inédit. Reena, Priyanka, Suman, Seema, Sugna et Krishna habitent toutes dans les environs ; elles ont décidé de diriger les opérations avec AMMACHI Labs.
En février, Victoria Falcó, de l’université espagnole Jaume I, a passé une dizaine de jours à Kanti pour participer elle aussi à ce projet. Elle effectuait un stage dans le cadre du Master en études internationales « Paix, conflit et développement » de la Chaire UNESCO de philosophie pour la paix. Victoria Falcó a greffé sur ce projet la méthode japonaise des 5 S, un outil de management pour organiser l’espace de travail. 5S est l’abréviation de cinq termes japonais : seiri (trier), seiton (ranger), seiso (nettoyer), seiketsu (normaliser), and shitsuke (entretenir). Ce système est utilisé depuis de nombreuses années dans l’industrie.
Par ailleurs, Victoria Falcó a souligné que le facteur-clé réside dans la prise en compte du contexte culturel dans lequel évoluent ces femmes. Comme dans de nombreux endroits dans le monde, les villageoises de Kanti vivent dans une société dominée par les hommes où elles sont bel et bien victimes de violences directes.
L’idée principale de Victoria Falcó est d’autonomiser les femmes sans pour autant risquer de les mettre en danger quand elles participent à des campagnes communales de nettoyage ou autres actions de sensibilisation. En même temps, elle affirme que les femmes et les hommes doivent être considérés comme deux parties égales de la même équation, l’une n’excluant pas l’autre ; c’est ainsi que les voix des deux parties doivent être entendues afin de pouvoir revenir à l’égalité et à la coopération.
« Nous devons patiemment imaginer et mettre en place de vraies solutions en prenant en compte les spécificités du contexte et ne pas imposer des actions qui pourraient mettre la vie d’autrui en danger au nom du soi-disant « succès » de notre projet, a-t-elle expliqué. Notre devoir est de comprendre toutes les parties prenantes du projet. Nous devons prendre en compte les problèmes rencontrés au quotidien, la nature des conflits et les points de vulnérabilité. Nous devons comprendre ce que les femmes font, voient, entendent et ressentent afin de créer des outils et des solutions. »
Le groupe a commencé par proposer des activités de sensibilisation selon la méthode 5S aux femmes du village et dans les écoles, afin d’expliquer le fonctionnement de ce système. Ensuite, elles se sont mises à l’ouvrage avec la mise en pratique des nouvelles pratiques de nettoyage à la maison et dans leur village. L’équipe est allée encore un peu plus loin en organisant des réunions avec les autorités locales, afin de proposer des manières d’intégrer les nouvelles habitudes dans les pratiques gouvernementales.
Des séances de partage des connaissances ont été organisées à chaque étape du processus. Victoria Falcó a montré aux femmes comment le micro-nettoyage contribue à restaurer la santé environnementale de notre planète au niveau global.
« N’oublions pas la nature car si nous l’oublions, nous cesserons nous aussi d’exister, a-t-elle dit. En résumé, nous devons travailler avec tout le monde et mettre la vie des gens au cœur du programme de solutions que nous voulons développer. Mais souvenons-nous également que nous faisons partie de la nature ; nos solutions doivent la prendre en compte, afin de lui garantir harmonie et protection. »
Ce projet d’AMMACHI Labs découle des précédents succès, obtenus en collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour la Démocratie (FNUD). L’objectif est de mettre en place des initiatives menées par les communautés dans les domaines de l’hygiène, de l’autonomisation des femmes et du développement durable. Au bout du compte, le projet 5S a entraîné la mobilisation de la communauté, initié des échanges importants et augmenté la sensibilisation au respect de l’environnement dans une perspective de réduction des déchets plastiques.
De plus, ce projet a également créé de nouveaux canaux afin d’amplifier la voix des femmes en tant qu’agissantes actives de transformation sociale ; il leur a permis de prendre des initiatives au sein de leurs communautés et de promouvoir les droits des femmes en tant que droits humains.